• « La peinture exprime la grande règle des métamorphoses du monde, la beauté essentielle des monts et des fleuves leur forme et leur élan, l'activité perpétuelle du Créateur, l'influx du souffle yin et yang ; par le truchement du pinceau et de l'encre, elle saisit toutes les créatures de l'Univers et chante en moi son allégresse »

    Shitao

    墨絵 Sumi-e: de l'encre à la contemplation.

    Le Sumi-e 墨絵, (sumi = baton d'encre noire et E = dessin) est aussi appelé plus populairement le "Suiboku-ga" 水墨画. C'est un dessin monochrome japonais à l'encre noire et à l'eau assimilé a la calligraphie. La technique du pinceau dans ces deux disciplines est identique du fait on parlera de Sumi-e pour le dessin et de Sho-do pour la calligraphie. Le Sumi-e est née en Chine il y a environ 1300 ans et a été repris par les artistes japonais au 14e siècle grâce aux moines boudhiste Zen.

    Uniquement constitué d'encre noire plus ou moins diluée, le Sumi-e est la simplification la plus élevée de la couleur en comparaison avec la peinture occidentale qui utilise toute la palette de couleur pour former lumières et ombres. Le fond blanc de la page fait corps avec le dessin et en fait partie intégrante, il y a contraste et harmonie entre les vides du blanc et les marques nerveuses et vivantes de l'encre. Le blanc est un espace de liberté, un silence à préserver, une ouverture sur l'infini.

    墨絵 Sumi-e: de l'encre à la contemplation.

    Le Sumi-e représente une forme d'art à part entière, mais c'est aussi une philosophie. C' est l'expression de la perception de l'artiste et il transmet l'essence de ce qu'il représente, plante, animal, etc. C'est la suggestion qui supplante le réalisme. Les sujets ne sont jamais peints dans l'intérêt de l'art, ils sont des expressions vivantes des forces invisibles au travail dans l'univers. Le Sumi-e est une symbolique et tente de restituer "l'esprit" des choses et on devine la profonde capacité d'observation, puis d'abstraction qui sont nécessaires au peintre-calligraphe qui a décidé de franchir le fossé entre une réalité concrète et sa propre vision, essentiellement spirituelle, elle-même reflet de son être intérieur..

    La pratique du Sumi-e passe aussi par la méditation et la maîtrise des émotions pour atteindre un état de concentration où seul le trait existe.
    Dans cet art où "l'esprit précède le pinceau", le peintre doit être totalement présent à son travail de sorte que sa main ne soit plus que le prolongement de sa pensée.
    C' est un exercice spirituel lié à la contemplation, une méditation et une réflexion avant le dessin:

    Dans la préparation des matériaux:
    - Le râpage du pain d'encre (sumi) sur la pierre à encre (suzuri) dure un certain temps, et ce temps est consacré à la méditation. Il est construit sur le signe "huit" allant dans les deux sens du réservoir de l'encre (océan) à la surface de meulage (terre).dans l'acte de peindre,la dualité du yin-yang est très présente.
    - Le choix des pinceaux (fude) en poils de chèvre, de loup, et de poils de cerfs etc...déterminera les lignes et les nuances selon la capacité d'absorption et la flexibilité du pinceau. La tête de la brosse doit tenir compte des courses appuyées et légères et aussi bien de la tonalité. Un bon pinceau de Sumi-e doit permettre de créer différentes valeurs de tons et dégradés, et il doit changer la forme de la ligne en même temps.
    - Le choix du papier par sa finesse de grain, sa capacité d'absorption.Il y a plusieurs choix mais les meilleurs papiers sont faits à partir des fibres de gampi ou de kozo (fibres de mûriers).

    Dans l'exécution technique:
    La technique fondamentale du Sumi-e s'apprend en pratiquant la calligraphie. Cette technique exige un mélange de contrôle de soi et de spontaneïté. C'est l'harmonie intérieure qui guide la main et mène le pinceau selon l' expression des sentiments intérieurs de l'artiste. Ceci permet à l'artiste de se concentrer sur le cheminement du pinceau sans devoir s'inquiéter des couleurs et de la composition. On parle de "souffle de vie dans ce jeté de trait et il est impossible de revenir en arrière et de corriger le trait une fois sur le papier, l'artiste doit avoir un shéma complet dans sa conscience avant de commencer. Tout comme dans la calligraphie la rapidité et la précision sont de rigueur.

    墨絵 Sumi-e: de l'encre à la contemplation.

    L'attitude corporelle est la même qu'en calligraphie, le pinceau est vertical et perpendiculaire au papier. il doit être tenu légèrement entre deux ou trois doigts et le pouce. Le pinceau doit-être tenu au milieu du manche, loin de la tête, de sorte que le bras soit presque parallèle à la surface de travail. La main et le poignet se déplacent jamais ou à peine c'est le bras qui doit effectuer la plus grande partie du travail.

    Références de cet article sur Artpaper

    Je vous laisse aussi un lien sur le très beau site de Kazu Shimura qui est un maitre en ce domaine. Sur son site il y a tout sur le sumi-e et vous pourrez trouver des videos qui apprennent comment pratiquer le Sumi-e.


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  • Takashi Naraha est un sculpteur japonais né a Mito. Il est connu pour son travail sur les blocs de diabas c'est a dire un granit noir, trés dur qu'on ne trouve qu'en Suède.
    C'est suite a un Symposium de sculpture organisé en Suède en 1973 qu'il s'est consacré au diabas

    Le diabas est né de la lave des volcans précambriens, infiltrée dans les fissures de la terre lors des séismes. Cette pierre se présente verticalement dans le sol. Contrairement aux autres granits solidifiés en surface, elle se fige lentement, à l'intérieur des fentes qu'elle a pénétrées à haute température - d'où la trame très serrée de ses cristaux. Etant donné les nombreuses fêlures, atteindre les 50 cm3 de pierre utilisable, demande d'explorer le bloc et d'en rejeter 97 %, soit la plus grande partie.

    Takeshi Naraha le dresseur de pierres.

    Naraha perpétue l'art asiatique dans son triple fondement : spirituel, naturel et plastique : souffle, rythme, pensée, nature, pierre, chaque sculpture va à l'essentiel. Sculptée, chaque pierre permet à chacun de regarder en face l'univers. On retrouve toute la pensée boudhiste sur le cosmos et sa circulation des energies, la place infime de l'homme dans ce cosmos le cycle de la vie, des saisons et le mouvement du positif vers le négatif ou l'inverse. Ainsi, considérer l'Univers dans son ensemble, comme un organisme vivant, conduit entre autre le sculpteur à ne pas dissocier l'esprit de la matière, à ne pas faire de différences entre l'animé et l'inanimé, et à l'écoute de cet univers, à en saisir les lois de l'équilibre, le Yin et le Yang.

    Ce diabas, qui émet par endroit des lumières pénétrantes et vives comme celles des étoiles, et présente une peau rugueuse, presque douloureuse au toucher, se métamorphose, une fois poncé, pour attirer l'œil vers un monde de ténèbres. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il peut, selon l'angle, se transformer en miroir. On ne peut voir dans ces deux aspects de cette même pierre, que le dualisme des pôles positif et négatif.

    Takeshi Naraha le dresseur de pierres.

    Je laisse un lien vers le site officiel de Takashi Naraha où sont toutes ses sculptures

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  • Il y a une artiste que j'aime beaucoup pour sa pluralité c'est Kimiko Yoshida.
    C'est une photographe de talent japonaise, qui au travers de ses séries d'autoportraits, incarne une mariée paradoxale et célibataire, et nous laisse entrevoir une suite d'identités, une multiplicité de réflexions liées aux identifications, à la transformation, à l'unicité et à l'universalité.

    "Mon travail récent, intitulé Intangibility, porte sur une série d'autoportraits entre visibilité et invisibilité, entre apparition et disparition, entre apparence et abolition. Je cherche, à partir de la philosophie du zen, à montrer le regard de l'esprit."

    l'identité est un fantasme, une projection imaginaire, elle n'est qu'un feuilletage d'emprunts identificatoires successifs

    "En regardant vers la monochromie, là où se déterminent les significations du diaphane, de l'immatériel ou de l'intangible, chacun de mes autoportraits se présente comme une émergence, un effacement. Cette représentation paradoxale d'une figure qui tend à disparaître, s'évanouir ou se fondre dans la monochromie vise à un impossible, une impuissance, une précarité. C'est cet effet d'incomplétude qui rejette la signification ultime de l'image dans un au-delà de l'image. Il y a là une ambiguïté qui tient à cette distance incomblable entre le regard et son objet, à cet abîme où se découvre et s'assombrit la signification de toute représentation. Mon art ne porte pas sur l'identité, mais sur l'identification. La question qui se pose n'est pas : « Qui suis-je ? », mais plutôt : « Combien suis-je ? » Au total, je regarde mon autoportrait avec une sorte d'inquiétude comme une pure image, c'est-à-dire comme une puissance fascinatoire et terrible, que sa signification projette hors d'elle-même.".

    Kimiko Yoshida ou ses mille facettes.


    Après avoir quitté le Japon, profondément marquée par la place qui y réservée aux femmes, Kimiko Yoshida s'installe en France dès 1995, où elle se concentre sur des séries d'autoportraits qui étudient les relations entre sa culture d'origine et les cultures auxquelles elle ne cesse de s'exposer. Elle se considère comme une réfugiée usant du masque, comme moyen de survie et médium pour s'intégrer aux différentes cultures, se forgeant de multiples identités à partir de celle qui transparaît et disparaît derrière les masques. Elle réalise, pour cela, des photos de « mariées célibataires » où se défait mais à l'envers, la hantise de la petite fille horrifiée qui découvrit la servitude ancestrale du mariage arrangé et le destin humilié des femmes japonaises.

    Avec les significations nouvelles que j'ai gagnées en changeant de culture, avec la liberté que m'autorisent la langue et les structures de la pensée françaises, je réalise aujourd'hui des photos de « mariées célibataires » où se défait, mais à l'envers, la hantise de la petite fille horrifiée qui découvrit la servitude ancestrale du mariage arrangé et le destin humilié des femmes japonaises. Comment oublier cette confidence de ma mère quand j'avais huit ans et qui me fit tellement horreur ? Je découvris soudain que mes parents s'étaient vus pour la première fois le jour du mariage qui avait été intégralement arrangé par leurs familles respectives. Aujourd'hui, en une succession de figures sans doute conjuratoires, j'incarne une mariée paradoxale, intangible et célibataire, aux identités simultanément dramatiques, fictives, subtiles, parodiques et contradictoires. Dans une sorte de dépassement de ce qui fut mon expérience de créatrice de mode à Tokyo, je crée toutes sortes d'autoportraits quasi monochromes pour mettre en scène le mariage virtuel de la mariée célibataire, tour à tour veuve, cosmonaute, chinoise, manga, égyptienne, etc.

    Kimiko Yoshida ou ses mille facettes.

    Je laisse le lien vers son site :
    Site officiel de Kimiko Yoshida
    Personnellement je suis folle de la serie des autoportraits 2006 surtout "The green tea bride".

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  • Noriko Mizokawa est une jeune japonaise originaire d'Osaka, qui vit en France depuis 2004 et qui fait des tableaux de nus féminins absolument fabuleux. Elle n'est pas trop connu en France hélas mais elle mérite qu'on parle d'elle.
    J'adore l'originalité des formes et surtout les couleurs qu'elle emploie. Le sépia mélé au noir qui accentue la forme du nu c'est génial et puis il y a des traits plus fins comme en calligraphie qui n'oublient pas les origines de cette artiste et rappellent la touche "estampe" (façon Hokusai )réussi qui intensifient le nu et ce mélange est absolument réussi..
    Elle a réussi a faire vivre le coté ancestral du Japon et le moderne de l'occident.
    Le nu est une des premières formes qu'on voit en peinture, mais ce que j'aime chez elle c'est le coté sensuel qu'elle donne tout en restant trés sobre. J'aime le mélange des huiles qui crée les ombres chaudes du corps, j'aime les pauses de ces corps qui sont parfois lassives enfin si vous voulez en voir plus vous pouvez aller sur ce blog il y a quelques unes de ses oeuvres.

    Les nus de Noriko Mizokawa

    Noriko Mizokawa dit qu'elle aime prendre du temps pour achever un tableau, elle vit avec lui, comme son enfant. Elle le regarde, elle l'observe tous les jours en mettant des lignes et des couleurs.

    " Je ne peux pas m'exprimer en public, mais voyez mes peintures! Elles sont mes représentantes" dit-elle.
    Source: artmichiko.com

    Les nus de Noriko Mizokawa


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